Le secteur automobile de luxe traverse une zone de turbulences sans précédent à l’été 2025. Si des noms prestigieux comme Mercedes-Benz et Porsche enregistrent des baisses spectaculaires de leurs performances financières, Lamborghini affiche une résilience remarquable. Entre tensions géopolitiques, mutations technologiques et pression concurrentielle, cette crise marque un tournant pour l’élite de l’industrie automobile.
Des chiffres qui inquiètent pour Mercedes-Benz
Le bilan de Mercedes-Benz au premier semestre 2025 révèle un net ralentissement de l’activité. Le bénéfice net s’effondre de 55,8 % pour atteindre 2,68 milliards d’euros, tandis que le chiffre d’affaires chute de 8,6 %, à 66,4 milliards d’euros. Le deuxième trimestre concentre une grande partie des difficultés, avec un EBIT ajusté qui s’effondre de 56 %, à seulement 1,99 milliard d’euros, et un EBIT réel à 1,27 milliard, plombé par 750 millions d’euros de charges liées à la restructuration de ses activités en Argentine.
Les marges opérationnelles s’effritent également : la marque allemande revoit ses prévisions pour 2025, anticipant désormais une marge de seulement 4 à 6 %, contre 6 à 8 % précédemment. À cela s’ajoute un impact tarifaire américain évalué à près de 418 millions de dollars, conséquence directe de la guerre commerciale entre l’UE et les États-Unis.
Les ventes suivent la même tendance : en chute de 9 % au deuxième trimestre, elles reculent de 19 % en Chine et de 14 % en Amérique du Nord, deux marchés stratégiques pour le constructeur.
Porsche au bord de la crise de nerfs
La situation de Porsche est tout aussi préoccupante. Sur les six premiers mois de l’année, le chiffre d’affaires dégringole de 6,7 %, s’établissant à 18,16 milliards d’euros. Le bénéfice d’exploitation plonge de 67 %, à seulement 1,01 milliard d’euros. La marge opérationnelle, historiquement située entre 12 et 15 %, s’effondre à 5,5 %.
Les livraisons mondiales reculent de 6,1 %, pour un total de 146 391 véhicules. Le marché chinois enregistre une nouvelle chute de 28 %, accentuant celle de l’année précédente. Sur le plan technologique, le virage électrique peine à convaincre : la berline Taycan voit ses ventes s’effondrer de 49 % en 2024, puis de 6 % supplémentaires sur le premier semestre 2025. Porsche prévoit désormais de réviser ses objectifs électriques à la baisse, et envisage un recentrage sur l’hybride ou le thermique.
Conséquence de cette conjoncture morose, le constructeur prévoit la suppression de 1 900 à 3 900 emplois d’ici 2029. Plusieurs dirigeants clés ont déjà quitté leurs fonctions, et un plan de restructuration stratégique est en cours.
Lamborghini, la résilience en version sportive
Dans ce climat morose, Lamborghini fait figure d’exception. La marque italienne enregistre une hausse de 2 % de ses livraisons au premier semestre 2025, atteignant 5 681 véhicules, un record historique pour la période. Le chiffre d’affaires se maintient à 1,62 milliard d’euros, tandis que le résultat d’exploitation ne fléchit que légèrement, à 431 millions d’euros contre 458 millions un an plus tôt.
Sa stratégie d’électrification progressive semble porter ses fruits. Le modèle hybride Revuelto et l’Urus SE rencontrent un franc succès. Le lancement imminent du nouveau modèle Temerario devrait permettre de compléter une gamme 100 % hybride d’ici la fin de l’année. Lamborghini conserve une marge impressionnante de 26,6 %, très loin devant ses concurrents directs.
Malgré les droits de douane imposés par les États-Unis, la marque affirme être capable de répercuter ces hausses sans perte de volume, preuve de sa solidité et de son pouvoir de marque intact.
Facteurs de crise dans le luxe automobile
Les difficultés rencontrées par Mercedes et Porsche s’inscrivent dans un contexte global tendu. Trois facteurs principaux expliquent ce retournement brutal :
- Tarifs douaniers américains : malgré un allègement à 15 %, les répercussions économiques restent lourdes pour les constructeurs européens.
- Chute de la demande en Chine : le marché asiatique, essentiel pour les ventes haut de gamme, se replie fortement, notamment pour les marques allemandes.
- Transition électrique complexe : les investissements massifs dans l’électrification ne sont pas encore rentables, et les modèles EV haut de gamme peinent à séduire.
Comparatif des performances au S1 2025
Constructeur | Chiffre d’affaires | Bénéfice d’exploitation | Marge | Évolution livraisons |
---|---|---|---|---|
Mercedes-Benz | 66,4 Md € | 1,27 Md € | ~4-6 % (prévu) | -9 % (T2) |
Porsche | 18,16 Md € | 1,01 Md € | 5,5 % | -6,1 % |
Lamborghini | 1,62 Md € | 431 M € | 26,6 % | +2 % |
Alors que Mercedes et Porsche repensent leurs stratégies, Lamborghini confirme son positionnement unique sur le segment du luxe sportif. L’issue de cette crise pourrait bien rebattre les cartes du marché premium, poussant les constructeurs à revoir leur vision de la performance, de l’électrification, et de la rentabilité à long terme.